La politique européenne de la concurrence

1 – quels sont les objectifs de la politique européenne de la concurrence ?

L’État français peut influencer le niveau général des salaires de manière indirecte en jouant sur le SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance) et / ou sur le salaire des fonctionnaires.

En effet, si le SMIC augmente, les salariés mieux payés demanderont eux-aussi des augmentations de salaire. Si le salaire des fonctionnaires augmente, les entreprises devront elles-aussi augmenter les salaires pour attirer les salariés les plus compétents et éviter qu’ils ne se retrouvent tous dans la fonction publique.

Ainsi, en favorisant l'augmentation du SMIC et / ou du salaire des fonctionnaires, l'Etat favorise l'augmentation des salaires et ainsi le pouvoir d'achat des consommateurs.

panneau attentionToutefois, agir sur les salaires fait porter le risque d’une perte de compétitivité (prix) à l’économie. Le solde extérieur (les exportations moins les importations) risque de se dégrader. Cette dégradation joue alors de manière négative sur la croissance économique.

Ainsi, pour améliorer le pouvoir d’achat des consommateurs, le choix se porte davantage sur la baisse des prix que sur l’augmentation des salaires.

Or un marché concurrentiel favorise la baisse des prix. Le marché unique, qui est du ressort de l'Union Européenne, doit donc être un marché concurrentiel.

Mais comme la baisse des prix ne profite pas aux entreprises car elle fait baisser leurs profits, ces dernières cherchent à échapper à la concurrence par des pratiques anti-concurrentielles (ententes sur les prix, abus de position, etc.).

En luttant contre les situations qui assurent aux entreprises un pouvoir de marché par la politique de la concurrence, l’Union européenne préserve la baisse des prix garantie par les marchés concurrentiels et permet ainsi une amélioration du pouvoir d’achat des consommateurs sans perte de compétitivité pour l’ensemble de l'économie.

Remarque : un agent détient un pouvoir de marché lorsqu’il peut, par son comportement, influencer la détermination du prix ou des quantités du produit échangé sur ce marché.

Définition :
Politique européenne de la concurrence : recense l'ensemble des mesures et des lois visant à contrôler ou modifier les conditions de la concurrence sur un marché
.

Remarque : la politique de la concurrence empêche les entreprises d’échapper à la concurrence. Le seul moyen, pour elles, d’y échapper quand même, c’est l’innovation. La politique de la concurrence favorise donc le progrès technique, et ainsi la croissance économique.

2 – quels sont les modalités de la politique européenne de la concurrence ?

On identifie quatre principaux domaines de la politique européenne de la concurrence :

- les ententes : les entreprises s’accordent sur les prix ou sur le partage du marché (au niveau géographique, au niveau des parts de marché, etc.) ; dans ce cas de figure, il devient inutile pour les entreprises, de baisser les prix, d’améliorer la qualité du produit, d’innover, etc.

- l’abus de position dominante : une entreprise en position de domination sur un marché (parce qu’elle détient une part de marché importante par exemple) abuse de cette domination pour éliminer ses concurrents (prix prédateurs) ou dresser des barrières à l’entrée du marché;

- la concentration (fusion-acquisition) : une des manières pour une entreprise d’éliminer ses concurrents est de fusionner avec eux (fusion) ou de les racheter (acquisition). La concentration a donc pour effet d’affaiblir la concurrence et de placer l’entreprise en position de domination. L’entreprise peut alors fixer librement ses prix;

- les aides de l’État : peuvent constituer une concurrence déloyale en abaissant les coûts de production d’une entreprise (puisqu’une partie est prise en charge par l’État dans le cas d’une subvention, ou parce qu’elle paye moins d’impôts) et en lui permettant ainsi de pratiquer des prix plus bas que ses concurrents, avec le risque que ceux-ci soient éliminés et que l’entreprise se retrouve seule sur le marché. Elle peut alors fixer librement ses prix.

Ainsi l’Union Européenne peut condamner des entreprises à payer des amendes en cas d’ententes ou d’abus de position dominante. L’Union Européenne peut interdire des fusions – acquisitions entre des entreprises. L’Union Européenne peut interdire des subventions versées par des Etats à certaines de leurs entreprises.

Le cas le plus fréquent dans les pratiques anti-concurrentiels est l’entente, et notamment, l’entente sur les prix. Par exemple les fabricants de pièces automobiles ont eu tendance à s’entendre et ont ainsi constitué un cartel de producteur. Ils ont donc écopé d’amendes pour un montant total supérieur à 2 milliards d’euros depuis 2013.

Pour pouvoir les identifier, la commission européenne met en place une politique de clémence : un membre de cartel qui apporte des preuves de l’existence de ce cartel échappe à l’amende qui sera infligée aux autres membres du cartel.

3 – quels sont les limites de la politique européenne de la concurrence ?

* la politique de la concurrence accusée de favoriser la désindustrialisation

La politique industrielle désigne l’intervention des pouvoirs publics, par des aides par exemple, dans le but de soutenir ou de développer le secteur industriel d’un pays.

Les aides sectorielles qui constituent donc des outils traditionnels de la politique industriel sont désormais interdites par la politique de la concurrence européenne. Il n’est désormais plus possible non plus de protéger ses industries par des barrières tarifaires (taxe douanière), l’Europe étant une union douanière.

La politique de la concurrence et la politique industrielle entrent ainsi en conflit.

Aujourd’hui, les pouvoirs publics tentent de rendre conciliable avec les deux politiques en engageant des actions visant à promouvoir la politique industrielle sans entrer en conflit avec la politique de la concurrence. Il s’agit de combiner réglementation, structuration de pôles de compétitivité (exemple Lyonbiopôle dans le quartier de Gerland), commande publique (exemple commande de trains à Alstom par la SNCF en 2018), etc. pour dynamiser des secteurs innovants à fort contenu en valeur ajoutée, mais aussi de promouvoir des champions européens (exemple d’Airbus).

Il n'en reste pas moins que certains outils de la politique industrielle sont devenus inutilisables.

Or du fait d’un manque de compétitivité prix du à un coût salarial trop élevé et à un taux de change défavorable, nous assistons actuellement à un phénomène de désindustrialisation de beaucoup de pays développés, et notamment de la France.

* la politique de la concurrence accusée de défavoriser l'emergence de "géant européen"

Si les pouvoirs publics cherchent à promouvoir certains géants européens (comme Airbus), la politique de la concurrence est au contraire accusée d’empêcher leur émergence en interdisant les fusions – acquisitions entre des entreprises de grande taille.

Jean Monnet
Par exemple, la fusion Alstom / Siemens devait permettre de créer un géant européen capable de concurrencer le chinois CRRC. Mais le géant ainsi créé se retrouverait en position dominante sur le marché européen et pourrait fixer ses prix ; ce qui va à l’encontre de la politique européenne de la concurrence. Aussi la commission européenne a-t-elle interdit cette fusion en février 2019. Cette affaire démontre pour certains la domination de la politique de la concurrence sur la politique industrielle européenne.


* la politique de la concurrence accusée de la raréfaction de certains services publics dans les zones rurales

La décision de confier certains secteurs à des monopoles (France telecom, EDF, SNCF, PTT, etc.), le plus souvent publics, s’est justifiée pour garantir à toute la population l’accès à des biens ou services considérés comme satisfaisant des besoins essentiels au bien-être des individus.

L’introduction de la concurrence, quant à elle, est justifiée par un principe d’efficacité économique dont le corollaire est que les décisions des entreprises sont guidées par la recherche du profit. Or cette recherche du profit peut inciter les entreprises en situation de concurrence à déserter certains marchés locaux peu rentables du fait d’une demande insuffisante.

C’est ainsi que la libéralisation peut expliquer la raréfaction de certains services publics dans les zones rurales.

Conclusion : on peut identifier deux principales limites à la politique européenne de la concurrence : elle peut parfois entrer en conflit avec la politique industrielle et elle peut contribuer à la raréfaction de certains services publics dans les zones rurales. De plus, les baisses de prix qu’elle est censée induire ne sont pas si évidentes dans certains secteurs.