Quelles sont les facteurs de la mobilité sociale ?

1 – qu’est-ce que la mobilité structurelle ?

La catégorie des agriculteurs est une catégorie à fécondité supérieure aux postes libres dans cette catégorie. Aussi, la majeure partie des postes occupés le sont par des fils d'agriculteur, mais une part importante de ces fils d’agriculteurs doivent changer de catégorie : on dit que la catégorie des agriculteurs devient fournisseur en main d'oeuvre.

A l'inverse la catégorie des cadres est une catégorie en expansion et les enfants de cadre ne suffisent pas à occuper tous les postes (la fécondité chez les cadres est plus faible) : elle offre donc des perspectives de mobilité pour les autres catégories. C'est pourquoi une part plus importante de cadres ont un père appartenant à une autre catégorie.

Ainsi, lorsque la structure sociale se modifie, elle induit une forme de mobilité : il s’agit de la mobilité structurelle. Pour le dire autrement, la mobilité observée s’explique en partie par de la mobilité structurelle.

Définition :
Mobilité structurelle : mesure le nombre d’individus qui ont changé de statut social parce que la structure socioprofessionnelle a changé.

Les gains de productivité réalisés grâce au progrès technique qui donne lieu à une mécanisation dans l'agriculture et l'industrie précipitent la diminution du nombre des agriculteurs et des ouvriers. La désindustrialisation est aggravée par les délocalisations (coût de la main d'oeuvre moins élevé).
Les mouvements de concentration (augmentation de la taille des entreprises dans le but de réduire les coûts de production : économies d’échelle) réduit le nombre des autres indépendants (artisans, commerçants et chefs d'entreprises).
La tertiarisation de l'économie (ou montée des activité de services) et l'augmentation de la taille des entreprises permettent le développement des emplois de cadres, de professions intermédiaires et d'employés. Le développement de l'Etat providence (surtout pendant les trente glorieuses) a les mêmes effets (développement des emplois dans la fonction publique). Ainsi la salarisation s'accompagne aussi de la montée des qualification.

Conclusion :
Certaines catégories ne peuvent accueillir tous les enfants «qu'elles fournissent» et deviennent ainsi fournisseurs en main d'oeuvre pour les autres catégories. C'est le cas des indépendants et des ouvriers.
Leurs enfants devront ainsi changer de catégorie et seront accueillis dans les catégories en expansion qui sont les cadres et professions intellectuelles supérieures, les professions intermédiaires et les employés.

La mobilité observée est donc en partie structurelle. Pour autant, une partie de la mobilité n’est pas liée aux transformations de la structure sociale : la société devient plus fluide.

2 - la société devient-elle plus fluide ?

Comment mesurer la fluidité sociale ?

L’indicateur observé est le odd ratio ou rapport des chances relatives. Un odd ratio, terme importé des Etats-Unis, désigne à l'origine la cote des paris passés par exemple sur un champ de course (une cote de «6 contre 1»). L'odd ratio est donc un rapport de cotes. Appliqué à la mobilité sociale , il traduit le résultat de la concurrence entre les individus de deux origines sociales différentes pour atteindre une position plutôt qu'une autre. Plus la valeur est proche de 1, plus cette compétition apparaît égale ou parfaite, la société est donc plus fluide. Par exemple, si, sur 100 fils de cadres 80 deviennent cadres et 20 deviennent employés, alors que pour 100 fils d'employés, 60 deviennent employés et 40 cadres, on peut calculer le rapport de chances relatives : (80/20)/(40/60)=6. Les chances de devenir cadres plutôt qu'employés sont 6 fois plus élevées pour les fils de cadres que pour les fils d'employés.

Définition :
La fluidité sociale : mesure la mobilité sociale d’une catégorie sociale par rapport à une autre, par exemple la probabilité pour un fils de cadre de devenir cadre plutôt qu’ouvrier par rapport à la probabilité d’un fils d’ouvrier de devenir cadre plutôt qu’ouvrier.

Dans une étude de 1999, portant sur la période 1953 à 1993, en France, Louis-André Vallet montre que la fluidité sociale se serait accrue au rythme lent mais sûr de 0,5% par an (alors que la mobilité observée augmente fortement durant cette même période). Dans une étude plus récente portant sur la période de 1977 à 2003, il montre que la mobilité observée continue d’augmenter, mais que la prééminence de la mobilité ascendante sur la mobilité descendante a décliné depuis 1985, ce qui a pu renforcer le sentiment d’un l’arrêt de « l’ascenseur social ». La fluidité sociale continue bien d’augmenter, mais ce qui retient l’attention, est l’augmentation des déclassements sociaux (mobilité descendante).

Définition :
Mobilité observée : mesure le nombre d’individus qui ont changé de statut social parce que la structure socioprofessionnelle a changé (mobilité structurelle) et /ou parce que la fluidité sociale a augmenté (mobilité nette).