Qu’est-ce que l’engagement politique ?

1 – l’engagement politique et la diversité de ses formes

vote

La forme d’engagement la plus courante et celle qui est essentielle dans une société démocratique est le vote. Qu’il soit en faveur d’un candidat (suffrage exprimé), blanc ou nul, l’électeur manifeste son soutien ou son rejet d’un programme politique.


Remarque : certains considèrent que l’abstention est une forme d’engagement politique lorsqu’il s’agit d’individus qui refusent de voter pour exprimer leur mécontentement vis-à-vis de l’offre électorale.

milite
Un individu peut soutenir un parti politique simplement en votant pour ce dernier. Mais il peut aussi adhérer à ce parti en payant une cotisation : il obtient alors sa carte de membre du parti et devient ainsi un adhérant. Enfin, il peut devenir un membre actif, c’est-à-dire un militant en participant bénévolement «à la vie du parti» : participation à des réunions, organisation de meeting, distribution de tracts, collage d’affiches, etc. A chacune de ces situations correspond un degré plus intense d’engagement politique.


Remarque : l’engagement politique ne doit pas être confondu avec l’engagement dans la politique. On ne parle donc plus d’engagement politique lorsqu’un individu vit de la politique, c’est-à-dire qu’il en tire ses revenus.

greenpeace

Pour défendre l’environnement, il est possible de voter pour un parti qui défend l’écologie (EELV) ou même de militer pour ce parti. Mais il est aussi possible de s’engager dans le milieu associatif en soutenant par exemple une association comme Greenpeace : on parle alors d’engagement associatif.


Label Max Havelaar

Enfin la consommation engagée traduit également un engagement politique. Pour reprendre l’exemple de l’environnement, il peut s’agir de «boycotter» l’avion par exemple. La consommation engagée prend en générale deux forme : le boycott (action de ne pas acheter certains produits) et le buycott (action d’acheter des produits labellisées : bio, commerce équitable, etc.).


Mouvement flygskam
Un exemple de boycott : né en 2018 en Suède, le mouvement «flygskam» (littéralement la honte de prendre l’avion) contribuait déjà avant la crise du coronavirus «à plomber» le trafic aérien.


Conclusion : l’engagement politique est volontaire : il résulte donc du choix des individus. Il se traduit par une contribution matérielle ou non matérielle (donner de son temps pour aller voter, bénévolat, cotisations, dons, etc.). Il s’appuie sur des valeurs politiques et a pour but d’influencer ou d’interpeller les détenteurs de pouvoir. Il peut prendre des formes variées : vote, militantisme, engagement associatif, consommation engagée.

Définition :
Engagement politique : acte volontaire, qui vise à influencer ou interpeller les détenteurs de pouvoir et qui peut prendre des formes variées : vote, militantisme, engagement associatif, consommation engagée
.

2 – le poids des variables sociodémographiques dans l’engagement politique


abstention

Les personnes âgées sont celles qui s’abstiennent le moins, puis viennent les cadres et les plus diplômés. Les jeunes sont ceux qui s’abstiennent le plus. L’engagement politique (en ce qui concerne le vote) semble donc être plus important chez les personnes âgées, chez les plus diplômés et chez les cadres.


Conclusion : l’engagement politique semble en partie déterminé par des variables sociodémographiques : catégorie socioprofessionnelle, diplôme, âge.


Un engagement politique plus fort chez les plus diplômés ?

Capital culturel
Le capital culturel est l’ensemble des ressources culturelles dont disposent les individus : aisance à l’oral, qualité rédactionnelle, faculté de conduire une réunion, etc. Toutes ces qualités favorisent à la fois la réussite scolaire (et elles sont intériorisées et renforcées pendant le cursus scolaire) et l’engagement militant. Pour le dire autrement, un individu dépourvu de capital culturel aura du mal à militer. Un diplôme élevé traduit donc un capital culturel élevé et favorisera l’engagement militant.


Capital socialLe capital social est l’ensemble des relations personnelles qu’un individu peut mobiliser dans son intérêt. Or une partie de ces relations est forgée pendant les études. Ces relations vont permettre à l’individu de rencontrer d’autres militants et de mobiliser des ressources utiles au militantisme (donateurs, salles pour les meeting, etc.). Un capital social élevé, comme chez les cadres et les diplômés, favorise donc l’engagement politique.


Daniel Gaxie

à savoir : pour Daniel Gaxie (1979), certains agents s’estimant incompétents du fait de leur position dans la structure sociale et surtout de leur infériorité scolaire, entretiennent avec la politique un rapport d’exclusion qui aboutit au même résultat que les restrictions du droits de vote d’autrefois lorsque le suffrage était censitaire et non universelle. Il parle alors de «cens caché».


Un engagement politique lié à l'âge ou à la génération ?

Les jeunes ne sont pas dans la même situation sociale que les individus plus âgés : chômage plus élevé, revenu plus faible, précarité plus forte, patrimoine plus faible, etc. Les préoccupations des uns ne sont pas les préoccupations des autres. Les seconds sont dans une situation plus favorable à l’engagement politique.

Mais indépendamment de l’âge, la génération peut parfois être une variable plus pertinente pour expliquer la différence de comportement.


génération 1980

La génération désigne un groupe d’individus qui sont nés au même moment et qui ont vécu lors d’une même période. Il ont des conditions de socialisation assez proches et un même contexte socio-économique. Ils peuvent ainsi avoir des valeurs et des pratiques communes.


génération 68Par exemple, la génération des «68tards» grandit dans un contexte de paix, de démocratisation scolaire et de forte croissance économique. Elle arrive sur le marché du travail dans un contexte de chômage faible et connaît une insertion dans la société plutôt bonne. Ce contexte est favorable à son engagement politique et à une forte contestation. Ce ne sera pas le cas pour la génération qui arrive sur le marché du travail dans les années 1980, période où le chômage «explose».

Conclusion : la génération est aussi une variable sociodémographique permettant d’expliquer l’engagement politique. Une génération peut avoir connu ou non un contexte social favorable à son engagement politique.

Et pour certains, on ne peut pas dire que les jeunes ont un engagement politique plus faible que les plus âgés. Ils ont un engagement politique différent, relatif à leur génération. Par exemple, ils militent à leur façon, en utilisant davantage les réseaux sociaux que les générations antérieures.

Jacques Ion
Pour Jacques Ion, avec la montée de l’individualisme, on serait déjà passé dans les années 1990 d’un engagement vécu sur le mode du don de soi, impliquant une adhésion définitive et totale à la cause à des engagements de moins longue durée, plus diversifiés quant à leurs visées, davantage réversibles et n’impliquant pas l’abandon de toute vie familiale. Pour faire image, on serait passé du timbre au post-it. Cette image retranscrit bien l’engagement des jeunes aujourd’hui.


Conclusion : les jeunes n’ont donc pas cessé de s’engager politiquement, mais leur façon de s’engager a changé.


Un engagement politique moindre chez les femmes ?


socialisation différenciée sexe

La socialisation différenciée selon le sexe intervient de deux façons pour expliquer le plus faible engagement politique des femmes. D’une part elles sont socialisées de manière à avoir un goût moins prononcé que les hommes pour la contestation et le militantisme. D’autre part elles sont socialisées pour s’impliquer davantage que les hommes dans les tâches domestiques, le soin aux enfants, la vie familiale, etc. Elles disposent donc de moins de temps pour s’impliquer dans l’engagement politique.


Conclusion : le sexe est aussi une variable sociodémographique permettant d’expliquer l’engagement politique. A priori, les hommes s’engagent davantage que les femmes.

mouvement des gilets jaunesCe moindre engagement des femmes n’est toutefois pas toujours vrai. Par exemple le mouvement des gilets jaunes est un mouvement de contestation non structuré et spontané apparu en France en octobre 2018 à la suite d’appels à manifester principalement à partir des réseaux sociaux. Il s’agissait de protester contre la taxe carbone qui devait faire augmenter le prix des carburants et faire baisser le pouvoir d’achat des conducteurs. C’est pour cela que le gilet haute visibilité de couleur jaune a été pris pour symbole. Au mois de novembre 2018, la contestation s’organise autour de blocages de routes, de ronds-points et de manifestations le samedi.

danse

Les femmes sont aussi nombreuses que les hommes à s’engager dans ce mouvement. Elles y sont même plus visibles que les hommes. Elles y apportent leur «propre touche» comme la danse sur les ronds-points.


Conclusion : l’engagement politique est un acte volontaire : l’individu est libre de s’engager ou non. Pour autant, il semble en partie déterminé par des variables sociodémographiques : catégorie socioprofessionnelle, diplôme, âge, génération et sexe. Il est parfois difficile de déterminer l’intensité de l’engagement : si les femmes et les jeunes semblent moins s’engager, c’est surtout que leur engagement prend des formes différentes (formes moins conventionnelles).