Si la déviance est la transgression d’une norme, la délinquance peut être considérée comme une forme particulière de déviance : elle est la transgression d’une norme juridique.
Dès lors que cette transgression est connue, elle engage une réaction des institutions spécialisées de contrôle social et peut entraîner une sanction formelle (emprisonnement, contravention, etc.) relative à la façon dont l’acte est juridiquement qualifié (crime, délit).
Définition :Délinquance : ensemble des conduites qui sont sanctionnées pénalement car elles sont des infractions aux normes juridiques en vigueur dans une société.
Attention : il n'y a donc pas de distinction entre «délinquant» et «criminel» en sociologie. Toute transgression d'une norme juridique est un acte de délinquance.
Remarque : la délinquance est donc une forme de déviance, mais la déviance n’est pas forcément de la délinquance.
* la difficile mesure des actes de délinquance à travers l'exemple des agessions sexuelles :
L'agression sexuelle est un acte sexuel, sans pénétration, imposé par une personne à une autre personne. Cette infraction est caractérisée lorsque l'auteur a utilisé des violences, des menaces, une contrainte physique ou psychologique ou a agi par surprise. Elle est une infraction aux normes juridiques et elle est une conduite sanctionnée pénalement : elle est donc un acte de délinquance.

Le mouvement hastag #metoo est un mouvement social créé en 2007 sur twitter, et repris en 2017 par Alyssa Milano, qui consiste à libérer la parole de la femme dans le but de dénoncer les viols et agressions sexuelles commises dont elles sont victimes. Le mouvement hastag #balancetonporc est le variant français du mouvement hastag #metoo.
Au quatrième trimestre 2017, on constate une forte augmentation du nombre d’agressions sexuelles enregistrées (environ 1000 alors qu’une année auparavant, elles diminuaient de 500). Il s’agit de l’effet du mouvement hastag #balancetonporc qui encourage les femmes à porter plainte.
Ainsi, il n’y pas forcément d’augmentation du nombre d’agressions sexuelles, mais une augmentation du nombre d’agressions sexuelles comptabilisées. Cela veut dire que ce nombre était jusque là sous-estimé.
Pour autant, en 2017, seulement 14 % des victimes de violence sexuelle se sont déplacées au commissariat ou à la gendarmerie pour porter plainte et seulement 8 % ont formellement déposé plainte. Les raisons sont la honte, le découragement face à la lourdeur de la procédure et parfois l’attitude des forces de l’ordre lors de l’enregistrement de la plainte. Le traumatisme subi par la victime peut aussi la pousser à chercher à oublier l’acte en lui-même (sorte de déni).
À savoir : lorsque les victimes s’adressent aux forces de police, les interactions qu’elles ont avec ces dernières sont déterminantes de la façon dont leur cas va être traité. Leur démarche peut ne pas donner lieu à un constat d’infraction ou s’accompagner d’une requalification des faits.
Le viol est une agression sexuelle avec pénétration. Juridiquement, il entre dans la catégorie agression sexuelle grave : c’est un crime susceptible de la cours d’assise.
Avant que le viol entre époux ne soit reconnu, il était admis qu’une présomption de consentement aux relations sexuelles dans le couple marié résultait du devoir de cohabitation.
Puis en 2010, le législateur est venu supprimer la référence à la présomption de consentement des époux à l’acte sexuel. Et plus que de reconnaître le viol entre époux, le législateur en a fait une circonstance aggravante : la peine encourue est de 15 ans de prison pour un viol et de 20 ans de prison pour un viol sur conjoint.
Conclusion : la comparaison des mesures de la délinquance entre deux périodes (ou entre deux pays) est difficile au regard des évolutions constantes des normes juridiques.
* comment réduire le chiffre noir de la délinquance ?
Tous les actes de délinquance ne font pas l'objet de plaintes et ne peuvent pas, par conséquent, être comptabilisés. Les raisons à cela peuvent être de natures différentes, comme la honte (pour le viol), le traumatisme (pour des actes violents), la loi de l'omerta (loi du silence par crainte de représailles ou intériorisation d'une haine envers celui qui dénonce, la balance), la peur d'une mauvaise réputation (pour un quartier, un établissement, etc.), etc.
Le chiffre noir de la délinquance est la différence entre le nombre d'infractions réelles et le nombre d'infractions reconnues. Ce chiffre est par définition inconnu. Le chiffre noir de la délinquance est donc le nombre inconnu qui mesure la différence entre la délinquance réelle et la délinquance mesurée ou «délinquance apparente».
Pour disposer d'une mesure plus précise, il faut réaliser des enquêtes envers un échantillon afin de recenser le nombre d'infractions. Lorsqu'elles sont réalisées, on constate que la délinquance est en règle générale sous-estimée. Mais ce chiffre ne reflète pas forcément la réalité, même s'il doit s'en approcher un peu plus. Ce type d'enquête est une enquête de victimation (ou de victimisation).
Définitions :Chiffre noir de la délinquance : nombre inconnu qui mesure la différence entre la délinquance réelle et la délinquance mesurée ou «délinquance apparente».Enquête de victimation : enquête statistique auprès d'un échantillon de la population dont les questions portent sur les actes de délinquance dont ont été victimes les personnes interrogées.